Ismaël, 21 ans : comment il a mémorisé la moitié du Coran, sa méthode révélée
Et si l’histoire de la Kaaba et d’Ismaël réunissait plus de révélations et de traversées spirituelles que de grains de sable du désert ? Plongeons ensemble dans la naissance de deux courants spirituels dont Abraham, bras levés vers le ciel, fut la source intarissable.
Abraham : père de deux mondes spirituels
Martin Lings rappelle qu’Abraham n’est pas simplement le patriarche d’un peuple ou d’une nation, mais bien la racine commune à deux grandes puissances spirituelles. Deux nations à la destinée guidée, deux instruments pour la volonté divine. Dans sa vision, la bénédiction promise par Dieu ne se mesure pas en biens matériels mais selon la grandeur de l’Esprit.
- Le premier courant : Il voit éclore à sa surface prophètes et croyants, une dynamique portée durablement.
- Le second : Si l’eau de ce flot spirituel devint un temps altérée, vint le moment où Dieu y porta toute Son Attention en y suscitant le “dernier des prophètes”, rendant pur ce courant pour arroser de justes et de pieux croyants.
Abraham, nous dit-on, offrit donc à l’humanité deux cercles, deux centres sacrés, chacun élu dans le ciel.
Le départ de Hagar et Ismaël vers la vallée de Bakka
Abraham confia Hagar et Ismaël à la bénédiction divine, certain, selon Lings, que tout irait bien. Les Écritures relatent qu’ils atteignirent la vallée nommée Bakka (autre nom de la Mecque). Cette vallée – cernée de collines, traversée par la route de l’encens reliant la Méditerranée au sud de l’Arabie – symbolisait déjà l’appel du désert à la spiritualité. On ignore exactement comment mère et fils se retrouvèrent là, mais beaucoup, écrit Lings, suggèrent qu’ils y furent conduits par des voyageurs.
Arrivés au terme de leur périple, la soif gagne Hagar, qui, dans un acte de désespoir maternel, court par sept fois entre deux collines voisines à la recherche de secours pour son fils.
- Cet acte fonde encore aujourd’hui le rite du parcours entre Safa et Marwa, gestes rituels du pèlerinage musulman.
Le miracle a lieu : une source jaillit du sable au contact du talon d’Ismaël. Hagar canalise l’eau, sauve la vie de l’enfant et la sienne, donnant naissance au puits de Zemzem, halte bénie pour les caravanes à venir.
Bakka, la première maison sacrée et la lignée d’Ismaël
Le Coran confirme : la première maison dédiée à Dieu sur terre fut établie à Bakka. Martin Lings et de nombreux commentateurs soulignent que la Kaaba, reconstruite plusieurs fois, fut créée comme un symbole d’humilité devant Dieu, loin de toute fioriture architecturale. Abraham et Ismaël bâtirent ensemble ce sanctuaire, sous l’inspiration divine, exauçant la prière du patriarche pour sa descendance et appelant l’humanité tout entière au pèlerinage.
- Lings insiste : le rituel du tawaf (circumambulation autour de la Kaaba) ainsi que le sacrifice commémorant la délivrance d’Ismaël, trouvent leur racine dans ces événements fondateurs.
Le texte biblique, quant à lui, indique simplement qu’Ismaël se fixa dans le désert de Paran, mais les traditions arabes témoignent d’un enracinement en Arabie même, renforcé par l’émergence de ses descendants jusqu’aux confins du Hedjaz.
Kaaba, polythéisme et retour à l’unicité
Ce sanctuaire n’a pas toujours été monolithique. Au fil des siècles, la Kaaba fut envahie d’idoles, mais sa signification d’origine restait celle d’un centre du monothéisme. Avec la venue de Muhammad, descendant d’Ismaël, le temple retrouva sa vocation : être le premier lieu dédié à l’adoration du Dieu Unique. Les actes de purification de la Kaaba – briser les idoles, purifier son périmètre – sont rapprochés par Asad à la destruction du Veau d’or par Moïse, symbolisant à chaque fois le retour à la vérité et à l’alliance du Ciel.
Plus qu’un simple monument, la Kaaba s’impose comme un témoignage intemporel de l’unité et de l’humilité de l’homme face à Dieu, incarnée dans ce cube de pierre, paisible au cœur du monde et des hommes en quête de spiritualité.
En conclusion : l’héritage d’Abraham, à la croisée de l’histoire et du sacré, rappelle combien la soif de transcendance irrigue toujours les grandes civilisations humaines. Marcher aujourd’hui à Safa et Marwa, tourner autour de la Kaaba : autant de gestes pour s’inscrire, de la plume à la pierre, dans la mémoire vivante des anciens prophètes.
