Pourquoi six membres d’un groupe d’extrême droite ont-ils été condamnés pour des projets d’attentats islamophobes en France ?

Des profils âgés, des projets glaçants et une justice saisie : six membres du groupe d’extrême droite Action des Forces Opérationnelles (AFO) ont été condamnés à de la prison ferme pour association de malfaiteurs terroriste. Décryptage d’une affaire aussi inquiétante que révélatrice, sur fond d’alertes croissantes face à l’islamophobie.

Le déroulé du procès : des intentions terroristes sous surveillance

Ils étaient douze, ils sont six à être repartis du tribunal correctionnel de Paris avec une condamnation à deux ans d’emprisonnement ferme – bon, pas derrière les verrous, mais à domicile, bracelet électronique à la cheville. Leur crime ? Avoir fomenté, selon la justice, des actes visant la communauté musulmane. Les réunions du groupe servaient, selon le tribunal, à « préparer des membres à l’affrontement avec la communauté musulmane » : rien que ça.

Parmi les principaux condamnés figurent Guy Sibra, 72 ans, considéré comme le fondateur de l’AFO, Bernard Sorel, 76 ans, chef de la branche Ile-de-France, et Daniel Raimbault, 39 ans, ancien militaire recruté pour sa maîtrise des explosifs. Voilà un casting intergénérationnel peu commun – l’amour du « fait maison », version sinistre.

Pour les six autres prévenus, le tribunal a infligé des peines allant d’un an de ferme à du sursis, avec une pensée pour trois femmes du groupe. Quatre prévenus ont, eux, été relaxés de la principale accusation, même si trois devront quand même payer pour détention illicite d’armes. Petite consolation, dirons-nous.

Des projets d’attentats dignes d’un polar glauque

Le procès, tenu trois mois plus tôt, a révélé l’organisation « hiérarchisée et structurée » selon la juge antiterroriste, du groupe AFO. Si leurs « actions violentes concrètes » visaient surtout des lieux symboliques, la liste des idées énumérées fait froid dans le dos – et pas qu’en automne.

  • « Opération halal » : les femmes de l’AFO déguisées en niqab pour empoisonner de la nourriture dans les rayons halal de supermarchés, à coups de cyanure ou de mort-aux-rats. Oui, vous avez bien lu.
  • Projet d’assassinat de « 200 imams radicalisés », selon leurs propres mots.
  • Faire exploser la porte d’une mosquée à Clichy-la-Garenne.
  • Évoquer l’assassinat du rappeur Médine, qui s’est d’ailleurs constitué partie civile.

Toutes ces élucubrations ont été retrouvées dans des courriels, des notes et discutées durant les réunions du groupe, selon le parquet.

La défense tente de minimiser… la justice n’achète pas

Face à la gravité de ces charges, les prévenus ont tenté de jouer la carte du survivalisme : passionnés avant tout par la préparation à une hypothétique guerre civile, les comploteurs improv’ se sont défendus en parlant de simples « paroles en l’air », voire de « fantasmes ». Leurs avocats, eux, ont fait front contre la lourde accusation d’association de malfaiteurs terroristes, une charge passible de dix ans de réclusion, arguant que les projets n’en étaient qu’à un « stade embryonnaire ».

Le parquet, de son côté, réclamait cinq ans de prison ferme pour Daniel Raimbault et des peines avec sursis pour treize autres membres, incluant les têtes pensantes Guy Sibra et Bernard Sorel. Pour deux prévenus, des relaxes avaient même été demandées.

Un contexte nauséeux et une flambée d’actes islamophobes

Ce verdict ne tombe pas de nulle part : le procès s’est tenu tout juste après l’assassinat islamophobe d’Aboubakar Cissé en avril, puis celui d’Hichem Miraoui fin mai. Il arrive aussi dans un climat inquiétant. Entre janvier et mai 2025, les actes islamophobes se sont envolés de 75 % par rapport à 2024 (145 faits recensés contre 83 l’année précédente), notamment avec une explosion des atteintes aux personnes : +209 %. Des chiffres du ministère de l’Intérieur qui invitent à sonner l’alerte. On est loin ici des propos d’arrière-boutique, le danger était concret.

Conclusion : vigilance de mise, indépendance à soutenir
Si ce procès illustre la capacité de la justice à identifier et sanctionner ces dérives, il pose aussi la question de la vigilance collective. Rappelons, sans détour, à quel point la lutte contre toutes les formes de haine est essentielle. Même s’il est toujours plus agréable de parler de dons pour sauver les pandas ou pour voyager sur Mars, soutenir le journalisme indépendant reste un petit geste à grand impact pour notre démocratie. Faites-en bon usage !